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    Katanga :avoir deux pièces d’identités pour espérer être embauché

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    carte d'électeur tenant lieu de carte d'identité/infobascongo

    Au Katanga où les jeunes diplômés ont du mal à trouver un emploi, ceux qui viennent d’autres provinces ont encore moins de chance d’être embauché. Pour contourner cette difficulté, certains ont deux cartes d’identité, dont l’une mentionne qu’ils sont des natifs de la province. Une situation qui inquiète l’Office national de l’emploi, chargé de mettre en contact employeurs et demandeurs d’emploi.

    Jeune diplômée en Sciences sociales, Lina en a assez de faire le va-et-vient entre la maison et le siège d’une organisation locale à caractère tribale pour trouver un emploi. Cette dernière aurait été chargée, en ce mois de février, de recruter des jeunes travailleurs pour un mystérieux employeur. Depuis 10 jours qu’elle est inscrite sur la liste de demandeurs d’emploi, elle fait, comme de nombreux autres candidats, le pied de grue devant cette organisation. « Nous ne devons pas nous faire de soucis, car il s’agit ici d’emplois interdits aux ‘corps étrangers’ (non natifs de la province, Ndlr) », la rassure, à mi-voix, l’un des candidats.
    Ayant eu vent du même avis de recrutement, J. K. et deux de ses amis avaient, eux aussi, accouru au siège de l’organisation : « Un coup d’œil rapide sur les noms, la province d’origine, et nous avons été déclarés non éligibles par les recruteurs », témoignent-ils. Tous les trois font partie des fameux “corps étrangers”, des Congolais non originaires du Katanga. « Je suis rentré chez moi, dit l’un d’entre eux, prendre ma carte d’emploi », celle qui porte la mention « Origine : Katanga ».

    Discours d’exclusion
    Dans cette province du sud-est de la Rd Congo, riche notamment en minerais de cuivre et de cobalt, l’accès à l’emploi est, en effet, devenu de plus en plus difficile ces dernières années pour les « non originaires ». Les rivalités tribales ou régionales, souvent exacerbées par les discours d’hommes politiques, poussent parfois à l’exclusion du marché du travail des Congolais d’autres provinces, particulièrement ceux originaires des deux Kasaï (centre du pays), dont certains sont installés au Katanga depuis de nombreuses décennies.
    « Ceux qui ont compris cela ont profité des dernières opérations d’enregistrement sur les listes électorales, pour avoir deux cartes d’électeur (qui servent depuis plus de cinq ans de carte provisoire d’identité en Rd Congo, Ndlr) », explique J. K.. L’une des cartes indique la vraie origine de son propriétaire, l’autre de fausses indications et « n’est utilisée que quand on veut se faire embaucher quelque part ». Découragés, certains renoncent à postuler comme Jeff, un jeune ingénieur électricien qui, après avoir passé sans succès de nombreux tests et entretiens d’embauche, préfère, désormais, travailler à son propre compte. « Je n’écris plus de lettres disant ‘J’ai l’honneur, etc. etc.’, lorsqu’il y a une offre d’emploi affichée quelque part », dit-il.
    À l’Office national de l’emploi (ONEM), mis en place il y a quelques années pour soutenir la politique gouvernementale, la situation de l’emploi inquiète. Les sociétés, entreprises ou ONG qui recourent à ses services quand elles ont besoin de personnel, se comptent plutôt sur le bout des doigts. Certains employeurs ignorent jusqu’à l’existence de ce service public, tandis que d’autres préfèrent carrément se passer de son concours. Pourtant, « nous avons une base de données des demandeurs d’emploi inscrits chez nous, avec toutes les informations concernant leur qualification », regrette Gérard Kasongo, directeur provincial de cet office.

    Recruter la compétence, non la tribu
    Kasongo rappelle l’une des missions principales de l’ONEM, qui est de mettre en contact recruteurs et demandeurs d’emploi. Il se dit surpris que d’autres personnes ou organisations fassent le même travail à leur place. « Curieusement, ils le font mal. Nous espérons qu’ils comprendront et qu’ils vont revenir à la raison », déclare-t-il.
    Chef de service chargé de la formation des cadres et maîtrises à l’Institut national de préparation professionnelle, Jean-Pierre Kulu estime que cette discrimination à l’emploi devrait cesser au moment où les autorités tentent de mettre de l’ordre dans ce secteur. « Il ne faut pas continuer de faire des mécontents en recrutant en fonction de la tribu en lieu et place de la compétence », dénonce-t-il.

    Maurice Mulamba

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