RD Congo : Mal lotie, l’UNPC peine à fédérer les journalistes

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Siège de l'UNPC à Matadi/Infobascongo

Des journalistes de Matadi à la résidence du gouverneur au Ciné-palace/Infobascongo

La coordination de l’Union nationale de la presse du Congo (Unpc) au Bas-Congo donne l’aperçu de ce qu’est le syndicat des journalistes : mal loti, sans moyens et méconnu, il manque de pouvoir.

C’est dans une cave de moins de 3m² en ville basse à Matadi que fonctionne la section de l’Union nationale de la presse du Congo (Unpc) au Bas-Congo. Elle est louée par le patron d’Interpresse, une maison de vente des livres, des journaux et des fournitures de bureaux. La corporation des journalistes a transformé cette pièce exiguë en son bureau. Les deux tables qui l’ornent ont été offertes par Interpresse, l’unique ordinateur et les trois chaises en plastique achetés par le président sectionnaire de l’Unpc. « C’est dans ces conditions que nous fonctionnons. Nous n’avons pas de moyens financiers. Nous nous débrouillons », explique Dieudonné Muaka.
La situation n’est guère reluisante dans les autres provinces de la RD Congo : à Kisangani, au Bandundu, à Lubumbashi et à Bukavu. Dans ces deux villes au moins l’Union a ses bureaux au sein de la Maison de la presse. « Nous ne la voyons que lors de la journée mondiale de la presse et d’autres fêtes ou quand on arrête un journaliste. Elle est inexistante le reste du temps », témoigne un journaliste de Bukavu.
Pour se réunir lors des journées internationales et nationales de la presse, au Bas-Congo la corporation se tourne vers les autorités politiques. « Elles nous font marcher souvent et cela nous gêne, voilà pourquoi quand nous n’avons pas d’argent nous n’organisons rien », affirme Dieudonné. Mal lotie, cette Union qui fait office de syndicat des journalistes et s’occupe de l’autorégulation passe inaperçue à leurs yeux. « Je ne connais même pas l’Unpc ni son président », avoue une journaliste de la Radio télévision nationale congolaise, chaine provinciale.

Besoin de créer d’autres associations
D’autres journalistes en font fi. « Chez nous l’Unpc n’existe pas. Comment expliquez que sur près de 100 journalistes de Mbanza-Ngungu, seuls trois possèdent de carte de presse », se demande Jean-Luc Kissakanda, journaliste à la radio Ntemo. Elle est concentrée à Matadi et Boma alors que parmi les 32 radios communautaires de la province, seules six sont dans ces villes ».
L’absence de l’Unpc à l’intérieur du Bas-Congo n’est pas sans conséquences. La profession est envahie par des gens qui n’en ont pas qualité. « C’est souvent la cause des procès contre certains journalistes parce qu’ils ne connaissent rien de l’éthique et de la déontologie du métier », regrette Muaka. Rien ne marche du côté du comité national qui s’apparente à un club d’amis et qui n’entre même pas en contact avec nous ».
Les nombreuses invitations lancées aux journalistes pour s’acquitter de leurs cotisations et soutenir la corporation n’aboutissent pas. Seule la RTNC, chaîne provinciale avait commencé à s’en acquitter. « A quoi bon payer ces cotisations car quand nous avons de problèmes à Muanda, nous ne voyons pas l’Unpc », réagit une journaliste.

Siège de l'UNPC à Matadi/Infobascongo

Se sentant délaissés, les journalistes des territoires comme Luozi et Mbanza-Ngungu ont mis en place des associations. Mais le ministère de la presse a refusé de les reconnaître. « Notre but est de mettre ensemble près de 200 journalistes qui prestent dans les districts des cataractes et Lukaya et qui ont besoin de soutien et d’encadrement », argumente Jean-Luc de Mbanza-Ngungu.

ENCADRE

Pléthore d’associations de journalistes inactives

Journalistes spécialistes de l’environnement, du sida, de l’agriculture, Journalistes humanitaires ou amis des enfants, club des journalistes amis de la croix rouge.… Les associations de journalistes sont multiples à Bukavu comme dans toute la RD Congo. Pas une formation de journalistes sur un thème sans que ne soit suggérée en fin d’atelier la création d’un réseau ou d’une association que ce soit sous l’impulsion des bailleuses de fonds, des Ong qui ont organisé cette formation et veulent voir leurs activités relayées dans les médias, ou des journalistes pensant qu’ainsi ils auront des financements.
Ces associations lancées à grand renfort de communiqués dans la presse sont le plus souvent mortes nées. Elles ne font strictement rien sinon dire parfois qu’elles existent. Sans projet, sans objectifs concrets précis, sans motivation pour développer des activités, sans réflexion collective pour trouver des moyens de fonctionnement, elles n’existent le plus souvent que sur le papier.
Certains journalistes en tirent profit individuellement comme Janvier Murhula, un journaliste sportif qui se réjouit : ?N’eût été ma qualité de journaliste, je n’aurais jamais visité Lubumbashi ni voir le T.P. Mazembe jouer?. D’autres liés aux Ong aussi : ils font souvent leur communication moyennant finances. Mais s’ils sont collectivement appelés par ces Ong pour couvrir leurs activités, ils n’alimentent pas pour autant les caisses de leur association…
A Bukavu, celles qui sont dynamiques et actives sont rares. L’Association des femmes des médias (AFEM) impulsée par l’institut Panos Paris, est l’une d’elles. Elle bénéficie aujourd’hui de plusieurs financements extérieurs et s’est spécialisée dans la production des émissions sur les violences sexuelles.
De même le Club des journalistes sensibles aux conflits qui regroupe des journalistes des radios de la ville produit des émissions et des débats sur des questions de l’heure diffusés dans toutes les radios de la province ou les Journalistes pour la promotion de la démocratie et des droits humains (JPDDH) qui produisent des émissions et reportages sur les droits de l’homme, la démocratie, la bonne gouvernance, les violences sexuelles et le genre.
Des exceptions qui confirment la règle…

Thaddée Hyawe-Hinyi, Alphonse Nekwa Makwala

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