spot_img
vendredi, avril 19, 2024
More
    spot_img
    AccueilA la uneLE PROJET DE REFORME DU PAPE FRANÇOIS.

    LE PROJET DE REFORME DU PAPE FRANÇOIS.

    -

    Le samedi 13 avril 2013, une nouvelle a fait des vagues : l’annonce par le porte-parole du Saint-Siège de l’intention du pape de s’entourer d’un groupe consultatif et non décisionnel, formé de huit cardinaux issus de cinq continents pour le conseiller dans le gouvernement de l’Eglise et dans la réforme de la curie romaine. Parmi ces heureux élus, nous comptons un africain, l’archevêque de Kinshasa, Laurent Monsengwo Pasinya.
    Pendant que les médias congolais évaluent en termes de fierté nationale ou de prestige international le fait qu’un compatriote congolais soit nommé à cette lourde charge, nous choisissons dans les lignes qui suivent d’élever le débat pour déceler ce qui transcende les frontières d’une église nationale et faire comprendre au commun de mortels le sens profond de la démarche de l’actuel pape et  de la petite révolution du palais qui se concocte avec l’inspiration évidente de l’Esprit de Pentecôte.

    Le pape François au lendemain de son élection, le 14 mars 2013. REUTERS/Alessandro Bianchi

    1. La foi chrétienne est une réforme permanente…
    Le pontificat de François est en train de franchir sa deuxième phase. D’abord se contentant de prêcher une église plus miséricordieuse, pauvre et missionnaire,  l’actuel pape veut passer à ce qu’il considère comme le levier central qui promeuve le peuple de Dieu vers ce grand idéal de vie chrétienne qu’il a annoncé le premier mois de son ministère pétrinien. Les cardinaux élus dans cette espèce de  comité de sages s’attelleront ainsi à réviser la constitution apostolique  « Pastor Bonus» régissant le fonctionnement de la curie romaine, fortement ternie par les révélations vraies ou supposées de Vaticaleaks et par le rapport de gestion administrative qui empêche une relation directe du pape avec les chefs des dicastères et  une plus grande collégialité du pape avec ses pairs évêques.
    Ne perdons cependant de vue que les réformes préparées par François ne seront pas les premières ni les dernières de l’église catholique. Toute l’histoire de l’église est cousue de pré-réformes, des réformes et de contre-réformes. L’église elle-même est consubstantiellement définie comme « semper reformanda », à savoir comme appelée à se réformer sempiternellement,  à se convertir à l’image de son appel à la sainteté. Le travail actuel du pape s’inscrit dans cette dynamique interne à vouloir reformuler les principes de l’Alliance scellée au prix du sang par le Messie, à les adapter par rapport à l’évolution du temps sans pour autant édulcorer la vérité libératrice annoncée dans la Bonne Nouvelle de Jésus.  L’église que veut servir le pape François, c’est une église en chemin, acceptant de faire chaque jour un petit pas en avant jusqu’à ce jour où elle rencontrera l’Epoux céleste et le contemplera face à face.
    2. Vivre la foi chrétienne comme une dynamique marginale
    Le principal point central de cette réforme reste bel et bien la personne, la vie, la mort et la résurrection de Jésus de Nazareth. Toute sa vie durant, il a annoncé une bonne nouvelle qui prend à parti tout ce qui asservit, aliène et tue. Il critique les traditions déshumanisantes. Il met en question ce qui empêche la libération de la personne humaine, telle la pratique de la loi, du sabbat ou du temple etc. Jésus introduit une innovation fondamentale en créant dans le judaïsme légaliste et patriacalisé, un mouvement alternatif d’adeptes et de disciples comme germe du Royaume de Dieu.
    La foi chrétienne naissante comme celle de la communauté ecclésiale qui lui succède de nos jours se veut d’abord un mouvement marginal qui se met à la suite d’un Homme-Dieu marginal et tente de faire de sa cause une réalité. Jésus lutte à partir de sa situation marginale contre la marginalisation de personnes et groupes par la religion, la société juive ou le pouvoir politique.
    En lisant la récente biographie du pape François sous la plume d’Andrea Tornielli, François Le Pape des pauvres, sorti il y a un mois aux éditions Bayard Culture, l’on est frappé par le portrait de frugalité de ce pape et de son attention envers tous ceux qui sont marginalisés. Son premier appel au clergé de Rome d’aller vers la périphérie de paroisses trace indubitablement la nouvelle ligne de conduite pastorale de ce nouveau pontificat.
    Son prédécesseur Benoit XVI a lutté jusqu’à l’épuisement contre l’effacement de Dieu dans la culture contemporaine. Il a voulu contre vents et marées proclamer la vérité de Dieu comme la vérité de l’humain. Le présent pape veut continuer cette œuvre en allant à la rencontre du Dieu caché dans la chair humaine du monde, que le pouvoir politique s’emploie à dévaloriser et à mettre au ban du train de l’histoire en marche. Dieu n’est plus en rivalité avec l’humanité ! Son altérité creuse le désir humain, son infini loge désormais dans notre finitude. Jésus par ce nouveau pape veut nous apprendre à découvrir  son vrai visage divin chez les plus petits qui sont ses frères (Mt 25,40). La question de la vérité divine devient donc intimement liée à celle de la solidarité humaine.
    Rien à faire : si le nouveau pape et l’église dont il a pris la direction veulent ressembler à Jésus, il devront, comme leur divin Maitre, être accueillants et dialoguants avec ceux et celles qui sont rejetés. Qu’on s’entende bien : il ne s’agit pas d’une charité compassionnelle qui porte la simple assistance mais d’une lutte avec cette catégorie des sans-voix qui refusent les structures politiques et économiques iniques. Qu’est-ce la réforme voulue par le pape François sinon celle d’une église qui tout en vivant  dans le monde devienne d’autant plus crédible dans cette posture de marginalisée vis-à-vis de l’esprit mondain et vis-à-vis de la fausseté généralisée qui a élu domicile dans l’esprit et le langage de la culture ambiante de notre temps.
    3. Le nouveau programme d’exercer autrement le pouvoir…
    De nombreux séismes intellectuels au sein de l’église font trembler l’opinion de l’église et impose de voir la réalité d’après la demande accrue de réforme au sein de la barque de Pierre. Qu’on se rappelle simplement la pétition signés par 220 théologiens appelée Déclaration de Cologne (1989), puis le mouvement « Nous sommes l’église » ou encore une autre pétition signée par 143 théologiens et intitulée Eglise 2011 : un renouveau indispensable ( 4 février 2011). Autant de signes de temps qui imposent l’urgence de l’avènement d’une église qui appelle à cor et à cri le renouveau de vie et celui de l’animation des institutions qui la fondent.
    Et ce renouveau passe nécessairement par une nouvelle approche de l’exercice du pouvoir dans l’église. En propre, toute l’assemblée chrétienne appelle de tous ses vœux une nouvelle manière de gouverner dans l’église. Les pasteurs, dont celui de Rome, ne peuvent plus prétendre savoir tout et dicter tout à la place des milliards et deux cents millions d’autres membres de l’église, sans courir le risque de se couper de la base.
    Le nouveau pape en prenant le nom de François a pris ainsi l’option d’un nouveau programme de vie et de gouvernement. Car, en effet, François d’Assise dont il a pris le nom, formait en son temps une autre alternative au programme de l’Eglise vue et vécue comme système de pouvoir trop terrestre. Et cette alternative contre le pouvoir qui écrase et domine, le nouveau pape entend l’instaurer dans de nouveaux mécanismes de pouvoir où l’esprit démocratique retrouve sa véritable place dans cette église que le Concile Vatican II définissait à dessein comme peuple de Dieu.
    Est nommé peuple de Dieu parce que régi par le souffle de l’Esprit en vue d’y faire participer les charismes baptismaux de tous les fidèles. Pour ce faire, l’actuel pontificat aura l’avantage de promouvoir au sein de la mère-église un tissu des rapports qui tissent des liens sociaux efficaces et des réseaux communautaires chrétiens de base engagés dans les divers lieux de marginalisation et d’exclusion où vivent en si grand nombre les bannis de la terre et les laissés-pour-compte. C’est de cette base proche de la vraie réalité non révélée dans des médias qu’il faut lancer la mise en marche d’un processus conciliaire qui requiert un mouvement communautaire vivant, vigoureux et recréateur d’une église authentique dans ce monde nouveau du village global.
    La pertinence même de l’église dans le monde d’aujourd’hui, sa capacité communicative à dire le Dieu de l’Exode à ses contemporains viendra d’abord du témoignage interne qui émane de sa manière de vivre à son sein ce qu’elle annonce au monde entier. L’authenticité de son message dépendra présentement de la réforme qui viendra non du sommet mais de la base. Celle qui sourd de nombreuses aspirations vers un mieux-être spirituel et vital.
    La vraie réforme annoncée le samedi 13 avril dernier par François donnera de l’envol à toute l’église si et seulement si elle se fait à partir du monde de l’exclusion dans toutes ses dimensions sociales, culturelles, ethniques, religieuses, de genre, qui est le lieu prioritaire de chrétiens. Cette réforme doit se faire avec et dans les mouvements qui luttent contre l’exclusion sur laquelle se fonde la mondialisation actuelle : elle doit prendre fait et cause en faveur des mouvements de résistance globale, les mouvements de transporteur congolais qui veulent entrer dans leur droit, le mouvement des enseignants ou d’autres fonctionnaires de l’Etat auprès desquels doit se battre l’église afin de les aider à recouvrer leurs droits ;  les mouvements de droits humains bafoués dans les maisons carcérales ou dans des tribunaux où gagnent les plus argentés et les plus forts, les mouvements de défenses de paysans expropriés de leur terre par l’arrivée massive de multinationales occidentales et chinoises, les mouvements indigènes se battant pour que leurs territoires soient désenclavés etc. C’est à cet ensemble des exclus de la société que l’église experte en humanité peut porter la touche de sa foi chrétienne pour les aider à défendre l’avènement d’un mode juste, fraternel et solidaire. C’est de l’intérieur de ces mouvements qu’elle peut redevenir sel de la terre et lumière du monde…
    4. Le  tango argentin pour le pape François…
    Ce samedi 20 avril 2013, il s’est organisé à Rome un événement qui a échappé à l’attention de la majorité des internautes. En effet, sur la Piazza del Popolo, de 20h00 à minuit, la mairie de la ville de Rome en partenariat avec l’ambassade de l’Argentine en Italie a organisé en l’honneur du pape François un grand concert populaire dont l’entrée est restée gratuite et à la piste de laquelle se sont rivalisés des danseurs de tango d’origines diverses.
    L’événement a connu une grande participation des romains et des touristes venus de quatre coins de la planète. Mais ce qui a attiré mon attention, c’est que la base catholique et celle non catholique ne se contentent plus d’aller à la place Saint Pierre pour prier et écouter le message vivant de nouveau pape. Bien plus, ils tiennent mordicus  à ce que François reste Bergolio, que le nouveau pape maintienne ce trait de joie simple et sincère qui font ses atouts majeurs parce qu’ils le font demeurer humain avant d’être chrétien, un citoyen avant d’être prélat, un évêque de Rome avant d’être pape.
    C’est cette humanité qui lui permet de faire passer si spontanément le message d’amour de Jésus aux chrétiens, à créer l’empathie spontanée avec des non croyants et d’insuffler un souffle nouveau dans le diocèse de Rome et dans le monde entier. Les gens veulent rester chrétiens mais uniquement comme le divin Maitre l’a inauguré : dans la joie d’avoir répondu librement à la Bonne Nouvelle de liberté et de libération. Et cette Bonne nouvelle ne peut plus être vécue dans une église triste. Les chrétiens de la base veulent être heureux d’avoir reçu la Bonne Nouvelle d’amour et de pardon, de paix et de pauvreté et  de la vivre en toute liberté de cœur et d’esprit au milieu d’un monde vautré, comme dans du beurre, dans le matérialisme et consumérisme.
    « Réjouissez-vous dans le Seigneur, je vous le répète, restez dans la joie… Le Seigneur est proche » (Phi 4, 4). Il n’y a pas meilleure manière d’évangéliser que d’être bien dans sa peau, de ne pas se laisser vaincre par les soucis inutiles de ce monde, de recourir à la prière constante et à l’action de grâces, de laisser la paix de Dieu qui surplombe toute intelligence humaine nous prendre sous sa garde,  de trouver tout le motif de notre allégresse dans les choix simples de suivre Jésus qui revient bientôt et son style marginal de vie. De cela, François est passé maitre dans les premiers pas de son pontificat. Il s’agit à présent de diffuser à large échelle cette simplicité d’être et cette joie profonde de vivre selon l’Esprit de Jésus et d’en faire le nouveau style de vie de toute l’assemblée formée de plus d’un milliard et deux cent millions de chrétiens. Que sonnent les cymbales asiatiques, que le sol soit troué de pas exubérants de tango argentin ou de la samba brésilienne, que résonnent les tam tam africains et les guitares occidentales pour louer et glorifier Dieu ! Les pas de danse et les sons de musique seront désormais exhibés sur toute la planète comme signe de notre joie d’avoir reçu Christ dans nos cœurs et d’avoir décidé de nous mettre à sa suite. Comme jadis le roi David, l’humanité dansera pour Dieu, rien que pour sa gloire.
    Oui ! La fête de Dieu doit commencer dès ici-bas sur terre avant de culminer dans le chœur des anges et archanges. Pour ceux qui trouvent mes propos excentriques, je les invite à parcourir la Bible. Nulle part, ils ne trouveront  Satan ni ses suppôts en train chanter. Chanter les hymnes et louer Dieu est le propre de chrétiens qui ont choisi de traverser les épreuves de ce monde avec l’Esprit du ressuscité qui invite à vivre en marge de l’iniquité de ce monde, de porter leur petite croix quotidienne avec l’immense bonheur d’avoir été jugés digne de subir les outrages pour la plus grande gloire du Seigneur, d’exercer toute parcelle de pouvoir leur concédé dans l’église comme lieu de service gratuit et d’édification du Règne de Dieu et enfin de vivre d’allégresse comme expression évidente de notre confiance inébranlable en Celui qui a vaincu la mort. Chanter et louer deviennent in fine une arme fatale contre la léthargie et l’indifférence religieuse et la voie certaine pour convaincre les derniers indécis que nous avons trouvé la part meilleure que personne ne pourra jamais nous enlever…
    Prions abondamment, nuits et jours, en privé comme en communauté afin que le travail de ces huit cardinaux qui se réuniront du 1er au 2 octobre prochain  rejoigne le projet du Règne d’amour et de paix que Dieu veut instaurer dans notre monde à travers le ministère de son serviteur François.
    De Rome Sé/Abbé Germain NZINGA MAKITU.

    Articles Liés

    LAISSER UN COMMENTAIRE

    S'il vous plaît entrez votre commentaire!
    S'il vous plaît entrez votre nom ici

    Ce site est protégé par reCAPTCHA et la Politique de confidentialité, ainsi que les Conditions de service Google s’appliquent.

    Stay Connected

    0FansJ'aime
    0SuiveursSuivre
    0SuiveursSuivre
    21,600AbonnésS'abonner

    Articles recents