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    Kinshasa: Nadine, une cireuse décomplexée

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    (RCN J&D-UCOFEM-JED) Nadine Toko est cireuse à Kinshasa. Elle est l’une des rares femmes en Rd Congo à pratiquer ce métier taxé de vil et exercé uniquement par des hommes. Décomplexée, elle a le cœur à l’ouvrage, ce qui lui permet de soutenir son foyer. Mais elle est régulièrement victime de violation de ses droits.

     

    Nadine Toko,cireuse de chaussures.
    Nadine Toko,cireuse de chaussures.

    « Je n’ai jamais vu une cireuse ! C’est merveilleux de voir combien elle lutte pour la vie », s’exclame Célestine Mujinga, agent d’une société de téléphonie mobile. Il est 7h. Devant le supermarché « Kin Mart » en ville, elle regarde partir Nadine souriante, en train de claquer sur son coffret à cirage pour attirer l’attention des clients. Sur son dos, elle porte sa fillette de 14 mois et à l’épaule, un sac à mains en haillons. Quand quelques minutes plus tard, elle enduit de cire les chaussures d’un client sous des regards curieux, un homme lance : « C’est une femme courageuse à soutenir ». Le dynamisme de cette mère de cinq enfants est tellement apprécié que des hommes et des femmes lui tendent, parfois, un billet de banque. Certains cireurs aussi l‘encouragent. « Quand je la vois, je pense à ma mère, avoue un jeune cireur. Je suis content qu’elle se débrouille pour que ses enfants ne deviennent pas comme nous.»
    Dynamique et consciencieuse
    L’article 6 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels auquel la Rd Congo est Etat partie dispose : « Les Etats Parties au présent Pacte reconnaissent le droit au travail, qui comprend le droit qu’a toute personne d’obtenir la possibilité de gagner sa vie par un travail librement choisi ou accepté, et prendront des mesures appropriées pour sauvegarder ce droit. » En Rd Congo, le métier de cireur est considéré comme celui des enfants de la rue. En effet, ce sont eux qui s’y adonnent majoritairement. Mais Nadine se passe des stéréotypes. C’est depuis maintenant sept ans qu’elle exerce ce métier. « Au lieu de mendier comme font certaines femmes, j’ai préféré me battre pour suppléer le salaire de mon époux qui est cuisinier quelque part. Il n’y a pas de sots métiers, il n’y a que de sottes gens», me rappelle-t-elle. Aux petites heures du matin, elle quitte son quartier Mbanza-Lemba, dans la commune de Lemba, pour la ville, parcourant ainsi plus de 10 km.
    Pour attirer la clientèle, elle travaille avec beaucoup de conscience. « Quand elle cire mes chaussures, elles brillent. Et je suis assuré de la qualité de son cirage », témoigne un vigile commis à « Kin Mart ». A Kinshasa, plusieurs cireurs fabriquent eux-mêmes leur cirage. « Cela gâte plusieurs chaussures », affirme ce vigile. Quotidiennement, Nadine réalise entre 4000 Fc (4$) à 5000Fc (5$). Avant de regagner sa maison tard dans la soirée, elle achète de la nourriture pour ses enfants au grand marché.
    Discriminée
    Mais le travail de cireur expose Nadine. « Pas plus tard qu’hier, un monsieur m’a dit que je faisais un travail de bas étage. Il a proposé de coucher avec moi en échange de 5000 Fc (5$). Je lui ai fait savoir que ce n’est pas parce que je cire les chaussures qu’il doit me prendre pour une femme légère. J’ai notamment accepté ce métier pour ne pas me prostituer », met-elle en garde. Selon Me Natacha Munlemvo, l’attitude de cet homme est condamnée par l’article 174d de la loi du 20 juillet 2006 sur les violences sexuelles. Il dispose : «Quiconque aura adopté un comportement persistant envers autrui, se traduisant par des paroles, des gestes, soit en lui donnant des ordres ou en proférant des menaces ou en imposant des contraintes, soit en exerçant des pressions graves, soit en abusant de l’autorité que lui confèrent ses fonctions en vue d’obtenir de lui des faveurs de nature sexuelle sera puni de servitude pénale de un à douze ans et d’une amende de cinquante à cent mille francs congolais constants ou d’une de ces peines seulement. Les poursuites seront subordonnées à la plainte de la victime ». Mais il n’y a pas que ça. Quand, une semaine plus tard, je la rencontre, toujours à « Kin Mart », elle larmoie en me montrant son coffret à cirage. « Regarde comment ce policier l’a cassée. Comment vais-je travailler ? Je rentre vers lui, il n’a qu’à me tuer ! », enrage-t-elle. Depuis plusieurs mois, des policiers de l’escadron mobile d’intervention de la Gombe traquent les cireurs et les vendeurs ambulants en ville. Le comportement de ce policier va à l’encontre de l’article 48 de la loi du 1er juin 2013 portant statut du personnel de carrière de la police nationale qui dispose: «Dans l’accomplissement de ses missions, le Policier doit respecter et protéger la dignité humaine, défendre et protéger les droits de l’homme, le droit humanitaire ainsi que les droits et libertés fondamentaux de l’individu, conformément aux normes nationales et internationales en vigueur. Il doit veiller particulièrement à la protection des droits de la personne vulnérable, de la femme et de l’enfant, en tout temps et en tout lieu. »

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