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    RD Congo:Clandestin, l’avortement met les filles en danger de mort

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    Photo Infobascongo
    Photo Infobascongo

    (Syfia Grands Lacs/RD Congo) Au Sud-Kivu comme au Bas Congo, les jeunes filles qui ont des relations sexuelles précoces ont de plus en plus recours à l’avortement pour ne pas être stigmatisées par la société. Mais cet acte, qu’elles croient à tort anodin, met souvent leur vie en danger et compromet leur avenir de mère.

    « Le succès pour la fille d’Idjwi consiste à courir avec le maximum de garçons », regrette Pélagie M’Musole, une habitante de ce territoire insulaire au milieu du lac Kivu, à l’est de la RDC.

    De plus en plus de filles se retrouvent enceintes, surtout après les vacances scolaires. Beaucoup préfèrent avorter pour ne pas être stigmatisées par la société et avoir par la suite des difficultés à se marier. « Mis à part du danger des infections sexuellement transmissibles contractées lors de ces relations non protégées, ces filles aux multiples partenaires sexuels ne savent plus à qui attribuer la grossesse qu’elles portent et elles se font donc avorter », explique Clovis Nyamurara, l’infirmier titulaire du centre de santé rural de Mugote. La loi congolaise réprime l’interruption volontaire de grossesse. C’est pourquoi « les filles avortent clandestinement, dans des institutions sanitaires pirates et de mauvaises conditions médicales », poursuit l’infirmier.

    Risque de mort

    « Zemi eza liyanzi (la grossesse est une chique qu’on peut ôter sans problème, Ndlr) », estiment aussi les filles du Bas Congo qui avortent sans calculer les risques qu’elles encourent. Un médecin a été arrêté, fin novembre, à Matadi (ouest de Kinshasa) pour avoir fait avorter une fille de 13 ans, retrouvée inconsciente chez lui. Deux jours avant, une infirmière avait aussi été emprisonnée, car elle avortait des filles dans sa chambre à coucher quand son mari était absent de la ville. Sa dernière victime, qui avait perdu beaucoup de sang, a eu la vie sauve grâce à son transfert in extremis à l’hôpital. « L’âge de ces filles va de 12 à 16 ans.

    Selon les risques, elles paient entre 50 et 100 $ », rapporte la police. Incapables de payer de telles sommes, des filles enceintes utilisent des produits pharmaceutiques ou des plantes médicinales. Selon Paul Wampilukila, chef-adjoint du centre du Service central éducation à la vie (Scev), « le manque d’éducation à la vie (sexuelle, Ndlr) des jeunes, la pauvreté, la réprobation sociale, la vente de médicaments abortifs à tous sans ordonnance médicale, l’échec des méthodes contraceptives sont les causes » de ces nombreux avortements.

    A Idjwi aussi, les jeunes filles sont peu informées des moyens contraceptifs et n’ont reçu aucune éducation sexuelle de leurs parents. Elles se font ainsi engrosser très jeunes (entre 14 et 18 ans) après être sorties avec des garçons pour l’argent et le plaisir sans se protéger. Les interdits religieux et les tabous liés à la sexualité exposent plus les jeunes villageoises suivistes et moins informées.

    Stigmatisation sociale

    Porter une grossesse hors mariage signifie l’opprobre pour ces filles et leur famille. « Comment aurais-je pu ne pas avorter moi qui tiens à mes études ? Et qu’aurais-je dit à mes parents ? », justifiait à son copain une étudiante du Bas Congo.

    Chez les insulaires d’Idjwi, les hommes, généralement polygames, pourvoient aux besoins de leurs épouses. « Non mariées, nous sommes sans revenu », explique une fille mère. Comme chaque fille tient à être la femme légitime de son mari, elles ne veulent pas avoir d’enfants hors mariage, poursuit M. M. qui a déjà interrompu deux grossesses. Des mères n’hésitent pas à emmener de force leurs filles à l’hôpital pour les faire avorter afin de sauver l’honneur de celles-ci et leurs chances de trouver un mari. « Je voulais garder mon bébé. J’aurais préféré qu’on se moque de moi au lieu de le tuer », se révolte une fille de Matadi, âgée de 14 ans : elle ne supporte plus sa mère, une infirmière, qui lui a fait passer son enfant sur son lieu de travail après l’avoir endormi avec des somnifères.

    Conscients que des avortements répétés ont des conséquences néfastes sur la fertilité de ces jeunes femmes, les responsables de l’éducation d’Idjwi ont introduit un cours « d’éducation à la vie » au programme scolaire. Les Églises ont suivi. « Nous nous occupons des enfants de 7 à 15 ans en insistant sur les bonnes traditions, le dialogue en famille », déclare l’abbé Floribert Toto, de la paroisse St Michel à Lwamarhulo.

     Dans les centres de santé du Sud-Kivu, le personnel soignant fait la promotion des méthodes naturelles pour ne pas concevoir et donne des conseils sur l’utilisation des contraceptifs ou des préservatifs. Les institutions hospitalières gérées par l’Église catholique vulgarisent, elles, l’abstinence en période de fécondité. Des femmes et des jeunes filles vont au Rwanda voisin, où elles ne sont pas connues et où les produits abortifs sont plus disponibles. L’accès au Norplan, un implant contraceptif introduit sous la peau de l’avant-bras par une grosse seringue, actif entre six mois et cinq ans, y est plus rapide et elles peuvent s’y faire injecter du Depo-provera, un contraceptif à longue durée d’action (3 mois). Thaddée Hyawe-Hinyi Alphonse Nekwa

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