Bas-Congo : des inspecteurs du travail sous pression

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grogne des empoyés d'indopakistanais /photo infobascongo
grogne des empoyés d'indopakistanais /photo infobascongo

(Syfia Grands Lacs/Rd Congo) Dans la province du Bas-Congo, les droits des travailleurs sont bafoués sans qu’ils ne soient bien défendus. Peu nombreux et souvent mal payés, les inspecteurs du travail n’ont pas le cœur à l’ouvrage et sont souvent soumis à diverses pressions.

 

 

A l’entrée de Matadi, l’entreprise chinoise Crec 7 finit de construire un nouveau pont sur la rivière Mpozo, ouvrage important sur la route nationale n°1 qui relie le chef-lieu de la province du Bas-Congo à la capitale du pays, Kinshasa. En décembre 2010, une quinzaine d’ouvriers qui ont travaillé dans le chantier ont dû faire un sit-in devant le cabinet du ministre provincial du travail, pour protester contre le sort qui les attend. « Nous n’acceptons pas d’être remerciés par les Chinois qui disent qu’ils n’ont plus besoin de nous, puisque les travaux vont bientôt finir », s’insurgeait leur porte-parole.
L’un des ouvriers protestataires a perdu ses doigts dans le chantier, sans être payé. Des inspecteurs du travail ont essayé de défendre leur cause, jugeant leur licenciement illégal. Mais sans succès. Aujourd’hui, l’un d’eux exprime ses regrets, impuissant devant les faits. « Dans le cadre des cinq chantiers, les Chinois disent qu’ils sont rattachés à la présidence de la République. Ils n’en font alors qu’à leur tête. Face à ce trafic d’influence, nous reculons… »

Des pesanteurs qui découragent
Ce cas n’est pas isolé. Au Bas-Congo comme partout ailleurs en Rd Congo, les travailleurs sont victimes de nombreux abus, sans que les inspecteurs du travail ne soient en mesure de défendre leurs droits. Non respect du nombre d’heures de travail, salaires inférieurs au Smig, absence de syndicats dans les entreprises, absence ou faible prise en charge médicale, licenciements abusifs…
Au Bas-Congo, ils ne sont cependant que neuf inspecteurs à devoir veiller au respect de la législation du travail, pour plus de 11 000 travailleurs du secteur formel. La carence des inspecteurs due à l’interruption de la formation, depuis plus de deux décennies, de nouveaux agents, fait traîner les conflits du travail et laisse les travailleurs des régions où ils ne peuvent intervenir sans solution. « Il est difficile avec un nombre aussi réduit de faire son travail », se plaint Bernadette Makaya, inspectrice provincial du travail. « Nous nous battons pour le faire, avoue l’un d’eux. Mais il existe de nombreuses pesanteurs. » Il fait état des pressions qu’ils subissent souvent des autorités qui soutiennent des employeurs, au grand dam des travailleurs.
Dans le petit local qui abrite l’Inspection provinciale du travail à Matadi, ils travaillent, eux-mêmes, dans de mauvaises conditions. Meubles et matériels de bureaux vétustes témoignent de la misère que vit ce corps de fonctionnaires de l’Etat. Ici, le moins gradé touche 55 000 Fc (60 $) de salaire mensuel, contre 57 000 Fc (63 $) plus une prime de 300 $ pour son collègue de Kinshasa. « Il est parfois ridicule d’être embarqué dans des véhicules des employeurs, alors qu’on doit aller traiter des problèmes qui les opposent à leurs travailleurs », dénonce un inspecteur.

Entre le marteau et l’enclume
Syndicalistes et employés les accusent ainsi d’être à la merci des patrons. « Nos dossiers traînent sans connaître de suite favorable, parce qu’ils sont corrompus », dit un journalier en conflit avec son entreprise. Il y a peu, un syndicat a voulu organiser à Matadi une marche avec ses affiliés contre l’Inspection du travail, accusée d’être de mèche avec des employeurs libanais et indopakistanais. Mais les employeurs sont eux aussi convaincus que les inspecteurs défendent les travailleurs, pour en retour recevoir de l’argent.
Ces accusations créent la frustration chez ces fonctionnaires. « Nous faisons un travail énorme mais il est regrettable qu’on sape notre dignité », fustige Marie-Jeanne Luzolo. L’inspectrice provinciale du travail pense que c’est un problème de conscience et que leur rôle, « c’est aussi de protéger les employeurs. » Côté syndicat des travailleurs, on plaide en définitive pour que l’inspecteur soit « au centre, expéditif et dise correctement le droit pour éviter de causer des graves préjudices aux employés. »

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