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    JED en appelle à un état d’urgence pour sauver la liberté de la presse et exige la dissolution du CSAC

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    Dans un Rapport sur l’état de la liberté de la presse en 2011,  rendu public au lendemain de l’investiture du Président Joseph Kabila pour un nouveau quinquennat, Journaliste en danger (JED) lance un appel urgent au Pouvoir en place pour stopper l’escalade de la répression qui s’abat sur la presse depuis la crise postélectorale qui s’est installée au pays après les présidentielles du 28 novembre 2011.

    Alors que dans sa prestation de serment, le Président de la République a, une fois de plus, juré de faire respecter la Constitution qui garantit sans ambages les droits et libertés fondamentaux,  dont la liberté de presse et d’opinion, JED note avec une grande  inquiétude que l’étau se resserre chaque jour un peu plus autour des médias à Kinshasa et en provinces, et se traduit par des  menaces et arrestations des journalistes ; des attaques armées contre des maisons de presse ; l’interdiction des émissions et la fermeture des médias proches de l’opposition.

    Pour l’année 2011, JED a recensé et documenté au moins 160 cas d’atteintes diverses à la liberté de la presse dont près de la moitié enregistrés pendant la période électorale. Ces attaques contre la presse se présentent de la manière suivante :

    Ø  1 journaliste tué à Kirumba dans le Nord-Kivu en juin 2011

    Ø  42 arrestations des journalistes

    Ø  57 cas de menaces et d’agressions contre les journalistes

    Ø  43 cas de censure et d’entraves à la circulation de l’information

    Ø  17 cas de pressions sur les médias

    A titre illustratif de la répression qui s’est accrue contre la presse et contre la libre information au cours des dernières semaines qui ont précédé ou suivi les scrutins du 28 novembre, on peut citer les cas ci-après :

    Ø  Au Maniema, la Radio Communautaire Tujenge Kabambare (RCTK), une station émettant à Kabambare, un territoire de la province du Maniema (Est de la RDC), est fermée depuis vendredi 18 novembre 2011 jusqu’à ce jour, sur ordre de M. Isaac- Ernest Miyambo, administrateur du territoire. Il est reproché à ce média d’avoir diffusé, la veille, une interview de M. Sympho Muzinga wa Muzinga, leader d’un ancien mouvement armé d’auto défense dans le territoire de Kabambare, dénommé « Rïya Mutomboke » qui avait menacé de perturber les opérations de vote du 28 novembre dernier si le gouvernement provincial ne respectait pas ses engagements de payer leurs primes.

    Ø  A Kinshasa, Canal Futur TV (CFTV), une chaîne proche de l’opposition, a vu son signal coupé, lundi 28 novembre 2011 vers 21 heures locales, pour une durée de dix jours par le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel et de la Communication (CSAC). La coupure du signal était intervenue pendant que CF TV diffusait une émission intitulée « Spéciale soirée électorale » dénonçant les irrégularités constatées dans les différents bureaux de vote lors du double scrutin, présidentiel et législatif, et donnant les résultats de vote affichés dans un bureau de vote.   CFTV a été accusé d’avoir diffusé des « propos comportant des accusations sans preuve contre un adversaire politique ».   Mais, près de trois semaines après l’expiration du délai de suspension, le signal de Canal Futur TV n’est toujours pas rétabli, et cela sans aucune explication.

    Ø  A Kinshasa, Radio Lisanga Télévision (RLTV), principale chaîne proche de l’opposition, a été interdite de diffusion, le samedi 3 décembre 2011,  par le Conseil Supérieur de la Communication et de l’Audiovisuel (CSAC) pour une durée de sept jours. RLTV a été accusée d’avoir diffusé des résultats de l’élection présidentielle du 28 novembre 2011 dont la source n’était pas la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI). Son antenne provinciale de Mbuji Mayi, capitale de la province du Kasaï Oriental, a été assiégée, lundi 5 décembre 2011 vers 14 heures locales, par un groupe d’éléments de la police nationale congolaise fortement armés. Depuis, les deux stations ont cessé d’émettre jusqu’à ce jour.

    Ø  Depuis le samedi 3 décembre 2011, Le service de messagerie téléphonique, SMS, a été suspendu, jusqu’à nouvel ordre, dans tous les réseaux de télécommunication de la RDC, par M. Adolphe Lumanu, vice-premier ministre et ministre de l’Intérieur et Sécurité. Cette mesure dite conservatoire a été prise pour « préserver l’ordre public et assurer un aboutissement heureux du processus électoral en RDC ».  En dépit des protestations de la population,  et des dénonciations des Partis politiques et des Organisations de défense des droits de l’homme qui considèrent cette décision comme une atteinte à la liberté d’expression, le service de messagerie téléphonique demeure suspendu.

    Ø  Au Maniema, dans une correspondance adressée, samedi 3 décembre 2011, aux responsables des chaînes de radio émettant à Kindu, capitale de la province du Maniema (Est de la RDC), M. Pascal Tutu Salumu, gouverneur de province, les a enjoint de suspendre la diffusion en relais des éditions d’informations produites par les chaînes étrangères à savoir RFI, BBC et Africa N°1. Selon le gouverneur, cette décision était prise « dans le cadre des dispositions de sécurisation de la population de Maniema en rapport avec la publication des résultats des élections du 28 novembre 2011 ».  Plus de deux semaines après la publication des résultats, cette interdiction demeure.

    Ø  Au Kasai Oriental, la Radio Kibungie, une station émettant à Kabinda, un territoire situé à 140 kms de Mbuji-Mayi, capitale de la province du Kasaï – Oriental (centre de la RDC), a été interdite d’émission, samedi 17 décembre 2011, par MM. Paul Djonga et Bovic Ngefo, respectivement commissaire de district et directeur local de l’Agence Nationale des Renseignements (ANR) pour raison de « sécurité ». Un mandat d’arrêt a été lancé contre M. Toto Kasongo, directeur de radio Kibungie, qui vit depuis lors en clandestinité. La Radio Kibungie a, dans ses émissions, dénoncé les actes de fraude et de tricherie, qui se déroulaient au centre local de compilation de la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI).

    Ø  Au Kasai Oriental, les installations de la Radio Télévision Nationale Congolaise (RTNC), station locale de Lodja, un territoire de la province du Kasaï – Oriental (centre la RDC) ont été saccagées, lundi 19 décembre 2011, par les supporters d’un candidat député national qui accusaient la RTNC de critiquer leur leader.

    Ø  La Radio Télévision Débout Kasaï (RTDK), une chaîne émettant à Mbuji- Mayi, capitale de la province du Kasaï – Oriental, a été attaquée, vendredi 23 décembre 2011 vers 18 heures, par un commando armé de six personnes en tenue civile. Les assaillants ont forcé la grille des installations de RTDK en tirant à balles réelles et lancé du gaz lacrymogène dans le studio de ce média. Le journaliste Adolphe Tshikala qui s’y trouvait a été arrêté  et conduit au cachot de l’ANR où il a passé quatre jours avant d’être acheminé au parquet, mardi 27 décembre 2011.

    Ø  Kleber Kadiediem, directeur de Kasaï Horizon Radio Télévision (KHRT), une chaîne émettant à Mbuji- Mayi, a été attaqué, vendredi 23 décembre 2011, par un groupe d’éléments de la police  qui ont menacé de tirer sur lui. Le journaliste a été accusé d’avoir commenté, mardi 20 décembre 2011, dans un duplex sur les ondes de BBC,  l’absence des chefs d’Etats étrangers lors de la cérémonie de prestation de serment du président Joseph Kabila.

    Ø  Mathieu Kamango, journaliste à Télé 50, une chaîne proche de la mouvance présidentielle, a été violemment pris à partie, vendredi 23 décembre 2011, par un groupe d’éléments de la police militaire, non loin du stade des martyrs,  où M. Tshisekedi,  qui s’est autoproclamé Président de la République, avait annoncé sa prestation de serment. Kamango a été conduit manu militari au cachot du camp militaire Kokolo où il a été copieusement passé à tabac  et gardé pendant plus de cinq heures. Kamango a été dépouillé de tous ses biens et menacé de mort par ses bourreaux.

    Ø  Thomas Hubert, correspondant de BBC Afrique à Kinshasa, a vu son matériel de travail confisqué, vendredi 23 décembre 2011, par un officier de la garde Républicaine au moment où il tentait de faire un reportage sur la prestation de serment annoncé de M. Etienne Tshisekedi au stade des Martyrs de Kinshasa.  Ce matériel était composé d’un enregistreur audio, d’un micro de marque BBC et d’une caméra vidéo. Thomas  a dit à JED qu’après avoir contacté la présidence de la République son matériel lui a été restitué plusieurs heures après mais sans la mémoire contenant ses enregistrements audio.

    Ø  Au Kasai oriental, la Radio Veritas, une station communautaire émettant à Kabinda, dans la province du Kasaï- Oriental, est fermée depuis samedi 24 décembre 2011 par MM. Paul Djonga et Bovic Ngefo, respectivement commissaire de district et directeur local de l’Agence Nationale des Renseignements (ANR) pour « outrage au chef de l’Etat ». Radio Veritas a diffusé dans son journal du vendredi 23 décembre 2011 une information tirée  d’un site Internet,  faisant état de l’existence  des « deux Présidents de la République en RDC ». Dans cette édition du journal, les journalistes ont proposé que la RDC soit dirigée par un troisième Homme,  autre que Joseph Kabila et Etienne Tshisekedi qui se disputent la légitimité du pouvoir. Contacté par JED, M. Norbert Nevild, directeur de Veritas a déclaré que les journalistes qui ont présenté cette édition du journal ont été auditionnés, les 26 et 27 décembre 2011, à l’ANR autour de cette information. « Le responsable de l’ANR  m’a demandé de sanctionner les deux journalistes avant la reprise des émissions de la radio. Je ne peux pas les sanctionner, car les journalistes n’ont commis aucune faute professionnelle. » a ajouté M. Norbert.

    Ø  Dans la province du Bas-Congo, Célestin Kashala, directeur à Radio Bangu, une station communautaire émettant à Kimpese, un territoire de la province du Bas- Congo (sud- ouest de la RDC) a été arrêté, samedi 24 décembre 2011, sur plainte de M. Dominique Nsimbi, président local du Parti du peuple pour la Reconstruction et la Démocratie (PPRD, parti présidentiel). Kashala a été transféré le lendemain au cachot de la police de Matadi, chef lieu de la province, où il est encore détenu. Kashala est poursuivi pour « incitation de la population à la révolte ». Radio Bangu a été accusée d’avoir diffusé, vendredi 23 décembre 2011, une information ayant trait à la prestation de serment de M. Etienne Tshisekedi et incité la population à saccager le siège local du PPRD. Contacté par JED à partir de sa cellule,  Kashala a déclaré que sa radio n’a jamais diffusé une telle nouvelle. « Nous avons suspendu, par prudence, toutes les éditions des journaux parlés pour éviter de telles accusations », a-t-il ajouté.

    Dans ce Rapport intitulé : « La liberté de la presse pendant les élections », et dont une partie est consacrée à l’observation des médias durant la période de la campagne électorale, JED se désole également de constater que les médias congolais, dans leur ensemble, se sont engagés, et en toute connaissance de cause, dans une frénésie propagandiste qui a occulté les vrais débats démocratiques sur les candidats et leur programmes.

    Il s’ensuit, selon JED,  que la campagne électorale pour les présidentielles et les législatives du 28 novembre 2011 a été un véritable fiasco dans les médias. La dérive propagandiste des médias, y compris des médias publics, ponctuée parfois par des propos et discours d’incitation à la haine et à la violence, dans un climat de tension et d’intolérance politique,  a eu des effets pervers sur la sécurité des journalistes, et pose désormais une question de crédibilité et de professionnalisme de la presse congolaise.

    Face à un tableau aussi sombre et inquiétant de la liberté de la presse, et qui mine les fondements d’un Etat démocratique, JED en appelle aux plus hautes autorités du pays, et demande des mesures d’urgence pour sauver la liberté de la presse ainsi gravement menacée.

    Pour JED, les multiples interférences des politiques et des services de sécurité dans les médias, et qui continuent, en violation des prérogatives dévolues au Conseil Supérieur de l’Audiovisuel et de la Communication (CSAC) , consacrent l’échec de l’instance de régulation des médias,  dans ses missions reconnues de protéger le droit du peuple à l’information et de promouvoir le professionnalisme des médias.

    Face à l’incapacité avérée du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel et de la Communication (CSAC) à assumer son indépendance et qui met en péril la liberté de presse et d’expression, JED demande au Chef de l’Etat, dans ses prérogatives de Garant du bon fonctionnement des Institutions, d’ordonner la dissolution du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel et de la Communication (CSAC) dans sa composition et son fonctionnement actuels, en attendant la mise en place d’un organe plus crédible et plus compétent.

    Lire le Rapport annuel JED 2011

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